Retour vers le futur
En arrivant au Japon en décembre 2019, nous savions que nous en repartirions un jour, que ce jour viendrait, que c’était là un fait indiscutable, que toute résistance s’apparentait à un défi aux dieux, que la nature même du temps qui passe imposait la notion de fin, et que cette réalité cosmique s’appliquerait forcément aussi à notre expérience nippone. C’est somme toute habités par la conscience lucide qu’un sablier s’enclenche dès lors qu’on évoque une condition, une expérience, une stabilité que nous avons posé les pieds sur l’archipel... C’est pétris de l’amère certitude que le fait de naître nous condamne à mourir et à errer, le temps d’une vie, de situations précaires en situations précaires, que nous avons atterri à Tokyo.
Comme vous le voyez, nous abordons les facéties de la vie avec un sain rapport à notre finitude, contrairement à ce qu’assène la psychologue des enfants qui nous qualifie de « dangereux dingues » et de « philosophes ratés ».
Et donc, ce jour est arrivé. C’était en juillet. Nous avons fait nos cartons, dit au revoir à nos amis, aux collègues, versé des larmes parfumées de Saké (on avait pas mal bu à la Sayonara party), et avons pris l’avion. En vol, nous avons pu regarder France-Portugal à l’arrière de l’appareil grâce à l’option stream d’Air France à 18€, qui est épatante. Notre victoire a donné lieu à une explosion de joie qui a mis l’avion en piqué.
Autre parodie de la Cène - sayo party du boulot |
![]() |
Avant la sayo chez nous |
grand retour |
A noter en bémol tout de même, un méchant claquage musculaire lors d’un foot le jour de notre arrivée, qui a transformé ma fesse lisse à moi en carpaccio et a un peu assombri mon été.
Que retient-on à chaud de toutes ces années ? Qu’est ce qui va nous manquer, en quoi en sortons-nous grandis ? Tant de questions qui vous agitent bien sûr tous, et auxquelles, tradition oblige, je ne répondrai que par le petit bout de la lorgnette.
Tout d’abord il est évident qu’il nous faut faire le deuil des toilettes japonaises aux mille jets, ce cénacle réconfortant et ludique. Car moi aussi, J’accuse ! Qu’est-ce qu’on s’ennuie aux WC en France !!! A part la chasse d’eau il n’y pas de fonction amusante, l’endroit est réduit à sa simple fonction, la lunette est froide, on est à la merci de l’absence de papier. Alors qu’au Japon on se sent respecté, pris en charge dans son intimité, choyé, aimé.
Ensuite la gastronomie : diverse, pour tous les goûts, construite sur des produits d’exception. Du très simple au plus complexe, de la street food au bœuf de Kobé, il y en a pour toutes les bourses et on est rarement déçu. Sans surprise, les bons morceaux de thon (oToro, ChuToro) et le Wagyu bien préparé me manquent déjà. Mes cours de cuisine avec les amis de Tokyo et l’incroyable Mayuko ont aussi été des moments de grande joie (https://www.mayukoslittlekitchen.com, tentez le si vous passez au Japon)
Que dire des paysages ! Après près de 5 ans à arpenter le Japon de long en large, on était toujours autant subjugué par la beauté de la nature, par ces volcans qui fument, les infinies nuances de vert, les montagnes, les villages, les temples mystérieux, l’été à Hokkaido, les plages de Shimoda, le vélo à Shikoku, le ski dans la poudre.
Au-delà de ça, l’atmosphère générale faite d’un respect un peu compassé (et parfois hypocrite), les formules de politesse à rallonge, les inclinaisons dorsales, les traditions antiques, leur touche de désuétude exotique et de raffinement, vous nous manquer. On est tout de même heureux de retrouver la spontanéité latine qui pousse à aller vers son prochain et à engager la discussion, pour signifier par exemple un désaccord automobile. Avec ces ponctuations chantantes « non mais, l’autre ! », « va manger tes morts », « ouais ben c’est ça, connard ».
L’appartenance à une communauté nationale en pays étranger était aussi en soi une richesse et une chance ; on est à la fois pleinement dans le pays hôte , en immersion , mais aussi plus solidaires et unis dans une petite communauté française. Les liens sont tissés rapidement et sont durables.
Et puis le karaoké, le sumo, les randonnées, les izakayas, les onsens, les collègues, les amis, le shinkansen, le saké, le kabuki, le Japon.
Voilà pour un premier bilan.
Si ce petit post devrait être un point final à ce site, je vais tout de même continuer dans les mois qui viennent, car je pressens un potentiel tout à fait intéressant dans ma nouvelle vie dans les Yvelines pour raconter des bêtises et illustrer gentiment d’autres désuétudes exotiques et particularismes divers…
Gare à toi, Versailles, Zorro arrive.
Bon retour à vous! J'espère vous revoir très bientôt ! Jul
RépondreSupprimer👏👏👏
RépondreSupprimerA n’en pas douter, un bel épisode de vie en famille qui laissera des souvenirs heureux et beaucoup de nostalgie😌
RépondreSupprimerEn garde Zorro
Et ben voilà, après avoir ri à ces lignes, je pleure 😭
RépondreSupprimerJe pleure mon Japon qui était aussi plus gai avec vous 🥹 … mais promis je continue à y faire mes pèlerinages et je vous garde dans mes plus beaux paysages 🥰 en attendant quand même passez nous voir à Singap’ 😘
Place aux épopées versaillaises peuplées de bretons rétifs : vous allez voir, ce sera régressif et on n'aura pas fini de s'amuser !
RépondreSupprimerQuelle belle plume :) welcome back!
RépondreSupprimer