Ah... les onsens!
Le onsen 温泉 (prononcez o'n'saine), célèbre bain thermal japonais, souvent issu de sources volcaniques… Encore un sujet passionnant et que je peux maintenant, après une certaine pratique, détailler en expert et sans rougir.
Il y a deux manières de parler du onsen:
La première, un peu superficielle, aborde les résistances et les doutes d'un jeune occidental à la perspective de devoir se plonger tout nu avec ses enfants, ses collègues et ses amis dans un bassin d’eau trop chaude (car oui, le onsen, c'est à poil).
L’autre, bien plus intéressante, consiste à analyser ce que ces bains et leurs rites disent du Japon, du rapport au corps et à la nature, et de l’harmonie visée à travers cette curieuse manière de faire société.
Evidemment, je vais m’en tenir à la première.
C’était donc inéluctable. Le onsen étant au Japon ce que le beurre est à la Bretagne, il était difficile de ne pas plonger tôt ou tard dans ces bains délicieux. D’autant plus inéluctable que dans de nombreux Ryokans (auberges traditionnelles japonaises) il n’y a pas de salle de bain, et les ablutions se font au onsen ou ne se font pas. Commence alors une douloureuse phase de déni: l’hygiène et la pudeur se livrent un féroce combat. Le temps joue contre la pudeur qui après une belle résistance finit par abdiquer dans un râle. La famille ne sort pas indemne de cette longue lutte (« tu m’écœures », « il sent bizarre papa », « misérable cloporte »).
Vient ensuite la phase de la résignation. Affublé d’un yukata (kimono de coton léger), on se dirige timidement vers les bains chauds, devancé par une progéniture bruyante (sous le regard réprobateur des japonais) . Les hommes et les femmes ont leur onsen séparé. A noter que l’atmosphère générale est importante et les détails sont soignés. Au-delà des bains, le souci d’offrir un environnement raffiné avec des matériaux nobles et des agencements élégants se retrouve dès le vestiaire. On se dévêtit donc en mettant ses habits dans un casier. Puis on se dirige d’un air aussi détaché que possible vers les douches, attenantes au onsen. On s’assied alors sur un tabouret, les uns à côté des autres et l’on se récure de la tête aux pieds afin d’être propre comme un sou neuf pour pouvoir entrer dans le havre de paix. On dispose généralement d'une douche et d'un seau ou bassine, qu'il convient de remplir à intervalle régulier pour s'arroser copieusement.
Lors de l'entrée dans l'eau, une des difficultés est la température qui vous saisit et vous laisse généralement échapper un long cri, sous le regard réprobateur des japonais. On comprend mieux l’effroi des pauvres écrevisses plongées dans nos marmites ; le onsen m’a fait profondément évoluer sur ce point, et j’ai maintenant pris l’habitude de leur murmurer « attention ça va être un peu chaud », avant de les plonger doucement dans la casserole.
Une fois les picotements passés, vient la phase de la joie : quel bonheur… Certains onsens sont en pleine nature dans des lieux fantastiques. La beauté est à couper le souffle, on ne fait plus qu’un avec des paysages superbes (qui n’avaient rien demandé, les pauvres) et l’on peut se laisser sombrer dans une douce torpeur méditative - aussi longtemps que les enfants ne se mettent pas en tête de tenter un concours de saut (sous le regard réprobateur des japonais). Ces derniers mouillent souvent une petite serviette qu’ils se mettent sur la tête, ce qui leur donne une drôle de touche.
A noter qu’il existe aussi des onsens mixtes, pour des week-ends entre amis encore plus rigolos. Pour le coup un maillot est parfois fourni ; pas toujours.
Vient ensuite le chemin retour et le même rituel à accomplir en sens inverse avec application (sous le regard etc.). On sort apaisé de cette expérience, et pour ma part systématiquement avec une furieuse envie de dormir.
Le onsen et l’ambiance qui s’en dégage, entre raffinement et dénuement, devient vite addictif et dit vraiment quelque chose du Japon.
Du diable si j’arrive à dire quoi, hélas.
Merci pour cette superbe description ! On a l'impression de vivre l'experience avec vous ( ... mais heureusement non :-))
RépondreSupprimer